Ne pas céder au sommeil. Faire quelque chose, n’importe quoi, tracer un carré, tiens. Commencer par un carré. Une feuille de papier, un pinceau… Procéder mentalement, une ligne à la fois. Simple, direz-vous. Attention : la fatigue rend tout plus difficile. Sauf le sommeil, bien sûr. Un simple carré. Solide. Pour résister à l’appel de la nuit.
Maintenant, passer au cube. Deux carrés d’égale dimension, dessinés en perspective, l’un légèrement décalé, derrière l’autre, puis reliés par trois lignes obliques formant des arêtes. La quatrième ligne, je pourrais la mettre en pointillé, mais l’effet de transparence ainsi créé, mon cube s’en trouverait fragilisé. Or, je le veux indestructible. La quatrième ligne, donc, ne sera pas visible. Comment alors être sûr qu’elle y soit ? Qu’elle y restera ? Il me le faut pourtant, ce cube, étanche et permanent. Pour qu’à l’intérieur y brille mon état de veille. À l’intérieur, ma conscience, recueillie, préservée d'un monde opaque. La feuille blanche maintenant couverte de peinture noire. Un cube que nul, désormais, ne peut voir.
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Laissez-moi tranquille. J’ai un point à tracer sur cette feuille. Toute ma vie, tout ce que je fus, suis, serai, concentré dans ce point. Ma lenteur, ma colère, tout ce qui m’est encore possible... Au moment du Big Bang, l’univers entier tenait dans une tête d’aiguille : voilà ce qui s’appelle une réussite ! Encore faut-il pouvoir se concentrer… Il y a tant de gens ici. Que font-ils encore ici ? Qu’ils me laissent à la fin !
Seul, sur ma feuille blanche, mon point final.
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