Il y a un an, jour pour jour, mon père rendait son dernier souffle. Le jour de mon anniversaire. Un étrange hasard, dont je n'ai pu rien tirer. Encore aujourd'hui, la question reste entière : quel est le sens d'une vie ? La filiation nous enracine si l'on veut bien, mais après ? Avec l'affaiblissement des forces vitales, la routine change, se durcit. Le corps s'impose jusque dans les gestes les plus triviaux, lesquels forment une sorte d'emmurement du quotidien. Pourquoi tant d'efforts ?
Mon père, dans sa petite chambre de CHSLD, cueillait le plaisir là où il se trouvait : la gentillesse d'une préposée, le sourire de l'infirmière, un repas et, au fond de sa conscience parfois troublée, une image, un souvenir, un rêve.
Aujourd'hui, le temps me pèse un peu. Et puis ce poème, « Art poétique », de Miron, qui m'habite :
J'ai la trentaine à brides abattues dans ma vie
je vous cherche encore pâturages de l'amour
je sens le froid humain de la quarantaine d'années
qui fait glace en dedans, et l'effroi m'agite...
je suis malheureux ma mère mais moins que toi
toi mes chairs natales, toi qui d'espérance t'insurges
ma mère au cou penché sur ton chagrin d'haleine
et qui perds gagnes les mailles du temps à tes mains
dans un autre temps mon père est devenu du sol
il s'avance en moi avec le goût du fils et des outils
mon père, ma mère, vous saviez à vous-deux nommer
toutes choses sur la terre, ô mon père, ô ma mère
J'entends votre paix se poser comme la neige... | |
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