C'est une excellente question, je vous félicite.
Cela ce passait au matin, je ne dormais plus que d'un sommeil très léger, rempli d'une profusion d'images, de scènes incohérentes. Dans la toute dernière de ces scènes, j'étais un chevalier en train de dérouler un papyrus. Tiens, tiens : il n'y a rien d'écrit sur ce papyrus. Je déroule encore, jusqu'à ce qu'apparaisse au bas ma signature : Lent Slow.
Je me suis alors réveillé, en riant. Remarquez ceci : les initiales de ce pseudonyme sont aussi celles de mon nom : LS.
C'est donc dire qu'au coeur de mon identité, il y aurait cette idée de la lenteur. Que faire ?
Or, quelques années plus tard, en décembre 2004, Le Devoir lançait une invitation à ses lecteurs :
« Il y a deux semaines, notre journaliste Fabien Deglise consacrait une série d'articles au mouvement slow -- du Slow Food aux cittaslow -- tel qu'il est vécu en Italie, là où il a vu le jour. Le mouvement faisant des petits, nous invitions, en éditorial, nos lecteurs à nous parler des ' lenteurs ' du Québec. Le regard est assez pessimiste, comme en témoigne cet aperçu des lettres reçues. »Je voulus donc répondre sans délai à cette irrésistible invitation de mon journal. Apporter l'exemple optimiste d'une lenteur assumée. Montrer, par exemple, qu'il y a plein d'avenir dans le fait de prendre quarante minutes pour manger un demi-sandwich au jambon. Que manducation rime très bien avec éducation, que nourrir le corps procède de la même nécessité que nourrir l'esprit. Qu'il s'agit toujours, en définitive, de mordre dans la vie.
Surtout, je tenais à me positionner, sur l'échiquier mondial, comme un des précurseurs du mouvement slow. Je n'allais quand même pas avoir rêvé pour rien. Je songeai à créer une association, un club, une fondation, enfin une entité juridique qui porterait mon pseudonyme.
Avec mes vieilles pantoufles décousues, déchirées, je serais le chevalier d'une cause à ma mesure. Je lutterais contre l'abrutissement de la vitesse, contre sa mécanique qui écrase tout et contre son bruit qui plonge dans la laideur tous nos gestes de tranquillité.
Cette lettre au Devoir, que je n'ai pas encore terminée, serait bien sûr signée :
Lent Slow.
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