J'ai beau ne plus plus guère sortir de chez moi, les questions environnementales me rejoignent malgré tout, me tirent par la manche jusqu'à la
fenêtre : regarde !
Ce que je vois n'est jamais très joli. Et pour cause.
Lu dernièrement dans
Le Devoir : « Les ministères de l'Environnement sont aujourd'hui redéfinis comme des gestionnaires de projets économiques, comme des émetteurs de permis, l'un de polluer à certaines conditions, l'autre de dévaster tel écosystème moyennant quelques arbres ici et là, voire un simple lit de cailloux en espérant que les poissons le prendront pour leur ancien lit nuptial. Une part importante du travail des ministres consiste à masquer habilement ce glissement qui force leurs ministères à légaliser beaucoup plus la pollution et la dévastation qu'à protéger la Terre-Mère, ce que le public recherche encore avec un instinct qui remonte certainement à cette perception fondamentale de la vie, à l'origine d'un culte comme celui de la
Pachamama. » 1
Cet extrait exprime un constat à la fois lucide et terrible. Il rappelle les milles trahisons -- des plus insignifiantes aux plus graves -- auxquelles se livrent ceux qui reçoivent à chaque élection le mandat de promouvoir le bien commun.
Cela rappelle
L'Erreur boréale, ce documentaire-choc de Richard Desjardins et Robert Monderie, où, à une plainte envoyée au ministère de l’Environnement par des citoyens soucieux de préserver leur forêt, ceux-ci reçoivent pour toute réponse une lettre émanant de la compagnie forestière qui prévoit justement couper à blanc cette
forêt !
Et il n'y a pas que la forêt. De passage à l'émission
Tout le monde en parle, le ministre québécois de l'Environnement, Thomas Mulcair, bombait le torse. Son
avant-projet de loi sur le développement durable avait été bien reçu. En cette période précédant la pause des fêtes, les politiciens savent toute l'importance de créer dans l'esprit des citoyens une impression favorable.
2 Le ministre en a donc profité ce soir-là, devant deux millions de téléspectateurs, pour vanter la valeur de son projet, en parler comme s'il avait déjà force de loi. En vertu du constat de Louis-Gilles Francoeur, il y a pourtant fort à parier que l'avant-projet de loi sur le développement durable subira le même sort que la loi 112
« visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion
sociale », loi dont la clause dite
« d'impact » devait
« obliger désormais les membres du gouvernement à analyser les impacts de leurs décisions sur les
démunis » !
Ouf !
Déjà, à Québec, chez nos dirigeants éclairés, il est question du
« développement durable de la
motoneige »,
3 une contradiction dans les termes qui ne semble pas les gêner le moins du
monde : polluons sans retenue, pour notre plaisir, mais en tout respect des générations à
venir !
D'autant que, de l'aveu même de Mulcair, un des principaux problèmes en matière d'environnement, c'est la non-application des lois et
règlements !
Ce n'est donc pas se montrer cynique que d'affirmer que s'il y a développement durable ici, il ne sera endurable qu'à ceux dont l'intérêt sera de garder les yeux fermés.
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1. Francoeur, Louis-Gilles. «
À quand un ministère de la Pachamama ? ».
Le Devoir [En ligne]. (Vendredi, 10 septembre 2004) (Page consultée le 17 février 2008)
2. Lire à ce propos : Cauchy, Clairandrée. «
Brassage d'opinions : l'« effet » des Fêtes ».
Le Devoir [En ligne]. (Vendredi, 31 décembre 2004) (Page consultée le 17 février 2008)
3. Cité dans : Francoeur, Louis-Gilles. «
Nature : Le développement pas endurable de la motoneige ».
Le Devoir [En ligne]. (Vendredi, 31 décembre 2004) (Page consultée le 17 février 2008)